Chapeau melon et bottes de cuir - Hinata Kojima

Voilà maintenant plusieurs heures que le voile étoilé de la nuit s'était dressé au-dessus des habitants de Tokyo. Les fêtards étaient de sorti, prêt à faire des folies avant de retourner le lendemain à leur train train quotidien, pendant que de nombreux sourires mesquins se dessinaient sur les différents visages des vilains qui rôdaient, satisfait de pouvoir enfin commettre leurs futurs méfaits. Au milieu du brouhaha généré par l'animation des tokyoïtes, Nous nous apprêtions à faire notre entrée sur scène. J'ajustais mon masque, ainsi que mes gants afin de me préparer au mieux pour cette nuit qui allait être spéciale, car chacune d'elle se devait d'être unique lorsqu'on entrait en jeu. Une nouvelle fois nous devions surprendre le public, éblouir notre monde via notre élégance et notre habilité à nous sortir des situations les plus contraignantes, parce que c'était ce qu'on attendait des personnages que l'on représentait une fois le rideau levé.

Je me dirigeais avec désinvolture jusqu'au bien tant désiré, ne laissant pas le doute s'installer en moi ne serait-ce qu'un instant lorsque je traversais les différents obstacles qui jonchaient notre route. Le son de nos pas se mélangeaient aux bruits émis par les nombreux clichés des appareils photo et autres sirènes des voitures, conduites par les agents de police que je me plaisais à tourner une nouvelle fois au ridicule. La discrétion n'était pas de mise en cette soirée mouvementée, pas lorsque l'on tenait par tous les moyens possibles de devenir l'attraction de la soirée. L'objet de ma convoitise, source d'une courte mais forte obsession aussi grandissante que la marée humaine qui nous voyait accomplir notre nouvelle capture, ne tarda à entrer en notre possession. La tâche fut aisée, mais seulement grâce à l'aide apportée par mon éternel complice, dont je pouvais sans peine attribuer les trois quarts du mérite, que ce soit pour l'accomplissement de ce vole ou l'escapade qui s'en suivi. Des salutations sous les acclamations et divers jurons ne furent pas de trop avant de disparaître de la même manière que nous étions apparus.










Une partie du net s'agitait légèrement plus qu'à l'accoutumé. Il fallait dire que la venue d'une nouvelle tête qui gagnait rapidement en popularité auprès des jeunes, avait de quoi faire couler beaucoup d'encre et stimuler l'imagination de ceux qui suivaient de près son parcours. Le personnage qu'incarnait Lupin arrivait à égayer la vie d'un certain nombre habitants de l'archipel nippon en raison du mystère qui planait autour de lui, mais surtout du fait qu'il arrivait à le conserver tout en ayant une proximité pour le moins réduite entre lui et ceux qui suivaient ses frasques. Bien que peu nombreux, des pages sur les réseaux sociaux voir carrément des forums entiers lui étaient dédiés, afin d'avoir plus de chance de participer au jeu qu'il avait de base proposé malgré lui. Il n'y avait qu'une seule et unique règle, celle de lui proposer d'exécuter un vol. La personne qui en proposait un avait la possibilité de choisir une ville dans le Japon, ainsi que l'objet voulu. Il lui suffisait ensuite d'attendre en espérant que Lupin ait lu et accepté sa demande. Ce procédé permettait à n'importe qui de participer à ce petit jeu sans prendre d'énormes risques et faisait naître une grande excitation, lorsque l'on voyait sa demande être réalisé par le voleur des temps modernes. Rapidement les gens ne se contentèrent plus de simples demandes et allaient jusqu'à vouloir bâtir un profil à ce tandem sortant de l'ordinaire. Des légendes commencèrent à fleurir au fur et à mesure que notre duo de malandrins gagnèrent en popularité. On avait droit aux hypothèses les plus folles, dont certaines qui laissaient penser que Lupin était en vérité une femme ou bien qu'il était le fils d'un ancien inspecteur tombé suite à une sombre affaire l'opposant aux représentants de l'état corrompus. Depuis il a donc ensuite décidé de venger son père à sa manière envers la société, en perpétuant des vols en tout genre. Je devais avouer que ma préféré restait celle qui expliquait que Lupin volait parce qu'il cherchait désespérément un cadeau pour l'élu de son cœur.

Un tel romantisme chamboula le mien au point de tourner plusieurs fois sur ma chaise de bureau, jusqu'à ce qu'Arsène se décide à m'arrêter dans mon trip, jugeant tout ça bien trop dangereux pour mon estomac. Sa main tapota le haut de ma tête après qu'il m'ait vu exprimer mon mécontentement en faisant la moue. Au fond je ne lui en voulais pas tant que ça, mais j'étais un grand garçon capable de s'amuser sans se faire mal ! Certaines choses étaient peut-être destinées à ne pas changer. Arsène restait toujours celui qui veillait sur moi afin d'éviter que le pire puisse se produire, mais il en était pas moins différent concernant quelques points, du moins d'une certaine façon. On était loin de celui qui pointait sa tête près de mon berceau quand je n'arrivais pas à dormir, pour me faire rire via des grimaces sacrément étranges. Cet Arsène là ne m'aurait jamais laissé jouer au voleur, de peur que je me fasse arrêter à la première tentative. Son existence, ainsi que sa manière d'interagir avec moi restait un mystère que je ne tenais pas vraiment à résoudre. Pour moi Arsène était Arsène et à ses yeux je devais sans doute rester Hinata, même sous l'identité de Lupin. Un individu des plus banals ayant vécu une enfance du même acabit, quoi que vu le profil de ma sœur... Je me faisais des amis, me trouvais des passions et je devais comme tout le monde passer par le stress des examens. Bien que je n'étais capable de faire réellement apparaître Arsène aux yeux de tous, faute à un âge bien trop jeune durant cette époque, celui-ci faisait acte de présence que lorsque je me retrouvais seul dans ma chambre, afin de ne pas me faire passer pour un fou auprès des autres. À nous deux nous créions notre propre monde, née de ma volonté à ne pas vouloir le laisser seul. Bien que me parler lui suffisait amplement, j'éprouvais tout de même une grande tristesse et une culpabilité tout aussi énorme, de ne pas pouvoir faire en sorte qu'il puisse interagir avec d'autres personnes que moi. Les saisons défilaient, parfois en larme collé à lui, tentant de le resserrer avec mes bras bien trop petits, mais cette période ne dura qu'un temps.

Le gain en expertise et en maturité que m'apportait le temps, permit à mon protecteur d'exister pleinement. Une joie enfouie au plus profond de nous, attendant patiemment ce précieux moment se manifesta sans la moindre retenue, bien qu'au fond je désirais quelque chose de bien plus grand... Arsène était à mes yeux une personne exceptionnelle que je devais présenter au plus grand monde et de la meilleure des manières. C'était dans cette optique que naquit par le plus grand hasard Arsène et Lupin, suite à une lecture de diverses plaintes en tout genre sur les réseaux sociaux, allant du simple bug de logiciel à des menaces de morts. Une simple blague au milieu de cet immense champ d'informations m'interpella. Un salarié sous un nom anonyme, lança pour rire un défi consistant à lui donner une partie de l'argent de son patron qu'il jugeait comme étant un escroc. En récompense il offrirait un bon repas pour exprimer toute sa gratitude. Un défi que j'ai décidé de relever avec le très peu de courage que j'avais en réserve. Bien entendu j'eus droit à un non presque instantané d'Arsène, que j'ai dû ensuite supplier tout en me roulant sur le sol pour qu'il finisse par céder. Sans son soutien je ne pouvais clairement pas réussir un tel exploit, c'était à peine si j'osais prendre longuement la parole devant tout le monde en classe ! Notre monde devait gagner en ampleur, afin d'accueillir tous ceux qui seraient en mesure d'apprécier les personnages que nous comptions incarner. Un pseudonyme, un costume, mais surtout un booste de confiance inestimable venant de mon éternel partenaire, voilà la recette qui me permit de faire mes premiers pas en tant que Lupin. Notre premier coup fut un franc succès, bien qu'il demanda un à deux mois de préparations, mais le résultat fut assez satisfaisant pour qu'Arsène veuille réitérer l'expérience, à la seule condition que l'on devait tout faire pour garder mon identité secrète. Nous avions pris la peine de laisser un mot ainsi qu'une photo au salarié.